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Le design est une discipline stratégique et de management

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Olivier Rollot
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L’École de Design Nantes Atlantique a acquis aujourd’hui ses lettres de noblesse. Racontez-nous un peu son histoire. Et la vôtre puisqu’elles vont de pair depuis presque 25 ans.

Créée il y a trente ans, L’École de Design Nantes Atlantique est aujourd’hui considérée comme l’une des toutes meilleures écoles de design françaises. Elle dispense principalement aujourd’hui un diplôme de design en cinq ans et quatre DNMADE (diplôme national des métiers d’art et du design). Son directeur depuis 1998, Christian Guellerin, revient avec nous sur son histoire alors qu’elle s’est installée cet automne dans un tout nouveau bâtiment.

Il y a trente ans c’était sur une initiative privée qu’a été créé un atelier d’arts appliqués. La Chambre de Commerce et d’Industrie de Nantes Saint Nazaire en a ensuite repris la gestion tout en gardant sa structure associative. De mon côté, j’avais créé pour cette même CCI une école de commerce en 3 ans, l’Ipac, qui est aujourd’hui un bachelor d’Audencia. Quand la CCI a repris la gestion de l’école elle m’a demandé de prendre la direction de l’école pour voir si son projet était viable. 
A l’époque je ne connaissais rien à l’art ni au design mais j’ai tout de suite été séduit. C’était en fait l’école de management dont j’aurais rêvé, mêlant matériaux, graphisme, marketing, philosophie, etc. En quelque sorte une école de management de projet mais dans une culture propre aux arts appliqués qui se méfiait des entreprises. Mais comme je n’y connaissais rien je me suis sciemment assis sur ces préjugés pour affirmer que le principal objectif était l’insertion professionnelle des élèves. C’était inattaquable et cela changeait tout. Aujourd’hui nous avons plus de 100 partenariats avec des entreprises chaque année sur des problématiques d’innovation. Nous nous sommes d’ailleurs lancés dès 2002 dans le digital en créant la première formation française au design digital. C’était dans un autre bâtiment et avec une autre équipe tant la discipline était encore inconnue.
En 30 ans nous sommes ainsi passés de 70 à 1 800 étudiants. Nous avons été la première école de design privée à obtenir le grade de Master du ministère de l’Enseignement supérieur et de la recherche tout en devenant un établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général (EESPIG).
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L’École de Design Nantes-Atlantique a-t-elle aussi une dimension internationale ?

Notre internationalisation c’est la deuxième grande rupture de l’école après la professionnalisation. Avec 350 écoles de design dans le monde nous avons fondé l’association Cumulus que j’ai présidé de 2007 à 2013. J’y ai apporté un discours décomplexant les relations à l’entreprise et à la valeur ajoutée. Personne ne parlait de produits qu’il fallait vendre avant moi !
Pour nos étudiants nous trouvons salutaire qu’ils passent les deux dernières années de leur cursus à l’international. Je voulais qu’ils vivent une vraie expérience d’expatriation et nous l’avons d’abord rendu possible à Shanghai. Depuis nous avons conclu des accords semblables avec des écoles en Inde - à Bangalore, Dehli, puis enfin Pune – puis à Sao Paulo depuis 8 ans et enfin Montréal. Au Canada cela s’est d’ailleurs révélé plus compliqué en raison du grand académisme des universités. Nous sommes donc allés rencontrer un centre d’incubation – le Centech - pour interagir avec des start-up locales qui prennent nos étudiants en stage et leur permettent d’occuper immédiatement des positions stratégiques.
Ce n’est pas obligatoire mais tous nos étudiants peuvent ainsi partir passer deux ans à l’international. Placer pendant deux ans 40 étudiants à Shanghai nous a également donné une notoriété mondiale. Il faut aller dans ces villes monde et des pays naguère émergents pour comprendre que le centre de gravité géopolitique et économique de la planète va considérablement évoluer. 

Qu’apportent vos étudiants aux entreprises avec lesquelles l’école est partenaire ?

Les entreprises ont tendance à reproduire les mêmes modèles. Nous sommes là pour les mener vers des chemins de traverse. Au-delà de ce qui est beau nous travaillons sur la façon dont nous allons vivre demain. Le design est une discipline de représentation de la façon dont on va vivre demain. Nous avons évangélisé beaucoup d’entreprises en leur montrant l’effet moteur qu’a le design sur l’économie.

Comment organisez-vous vos différents cursus ?

Le diplôme de design est divisé en deux parties : d’abord un cycle bachelor en 3 ans, qui commence par une année commune suivie de deux années de spécialisations en UI/UX Design, graphisme, etc., puis un cycle master de deux ans. Pendant ces deux dernières années on peut partir à l’international ou se spécialiser dans cinq grands domaines : Care design, City, Digital, Food design ou Media design, qui sont cinq grandes thématiques sociétales déterminantes pour réfléchir et bâtir le monde de demain. Trois années pour apprendre un métier puis deux années de management de projet pour prendre plus de recul au sein d’équipes pluridisciplinaires.
Nous sommes également la seule école privée habilitée à délivrer des DNMADE en trois ans divisés en deux années scolaires suivies d’une année en apprentissage. Enfin nous dispenserons à la rentrée 2023 avec Audencia un tout nouveau Bachelor commun en Management de Projet Design et Communication.

Dans quelle logique avez-vous construit ces cursus ?

Je voulais casser la logique des arts appliqués. Le design est une discipline stratégique et de management. Le designer réunit autour d’une table des ingénieurs, des sociologues, etc. pour les faire travailler ensemble. Il faut réfléchir aux grandes problématiques sociétales autour d’un écosystème recherche. C’est dans cet esprit que nous avons construit nos labs. Le Design Lab étudie par exemple les rapports hommes / machines. Qu’est-ce qu’être humain quand les robots sont intelligents ? Dans le Food Design Lab, nous réfléchissons à ce que sera manger demain. Dans le City Design Lab aux modalités d’aménagements urbains. Le Care Design Lab a contribué à la construction d’une chambre connectée pour les malades d’Alzheimer avec le CHU de Nantes. 

Nous sommes également partenaires des Arts et Métiers pour un master de recherche, de Polytech Nantes sur les objets connectés, de l’Ecole vétérinaire, d’Audencia, de Sciences-Po… Nous sommes par ailleurs associés à Nantes Université avec qui nous collaborons sur plusieurs thématiques de recherche. 

Combien coûte le cursus de design ? Peut-on suivre son cursus en apprentissage ?

Chaque année coûte aux étudiants 7900€. Et l’apprentissage fonctionne très bien avec de 300 à 400 apprentis dès la 3ème année.
 

A l’issue de leur diplôme les designers s’intègrent-ils dans les entreprises en France à un niveau que vous jugez satisfaisant ?


Aux Etats-Unis nos étudiants, souvent passés par notre partenaire de Shanghai,  touchent des salaires équivalents à ceux des ingénieurs. Mais en France le design reste encore très inféodé à la culture et aux arts. Nous plaçons très facilement nos étudiants – 80% trouvent un emploi dans les six mois après leur diplôme – chez Orange, Thales, Renault, L’Oréal. Mais il faudrait encore qu’ils puissent s’élever plus haut dans la hiérarchie. On voit trop encore le côté créatif comme en marge de la hiérarchie dans les entreprises françaises. Or un designer peut très bien occuper d’autres fonctions. Par exemple être directeur marketing.
Nos diplômés sont aussi dans une dynamique entrepreneuriale et plus seulement de freelance. Nous avons des diplômés qui sont devenus très rapidement des entrepreneurs grâce au digital qui rend les investissements beaucoup moins lourds. Nos étudiants créent donc de plus en plus d’entreprises.



Crédit photo : Photo de Kaboompics.com